La République prendrait-elle conscience que son avenir (sinon politique, au moins financier) est en jeu ? En tout cas, c’est ce qu’on peut charitablement croire en apprenant la convocation récente des ex-ministres Attal et Le Maire par une commission du Sénat afin de comprendre comment un trou de plus de 100 milliards d’euros a pu apparaître dans les comptes publics.
Cependant et comme on pouvait raisonnablement s’y attendre, cette convocation a tourné rapidement en un petit spectacle politico-politicien dans lequel les uns et les autres se sont contentés de se renvoyer la responsabilité : après une fine analyse des politiciens, des experts de plateau et des journalistes appelés à commenter la consternante déconfiture publique française, il apparaît que le dérapage public observé est un événement sans aucun responsable, qui tient plus de la catastrophe naturelle, comme un glissement de terrain financier, plutôt qu’une série de décisions débiles prises par des incompétents sous coke persuadés de leur génie imputrescible.
Il faut absolument prendre quelques secondes pour regarder la vidéo ci-dessous et comprendre ce qui se passe actuellement dans les institutions républicaines pour prendre la mesure de la désinvolture absolue de nos dirigeants.
Bien sûr, on pourrait aisément épiloguer (comme le font les commentateurs en dessous du tweet original) pour savoir qui, de Attal ou de Husson, décroche la timbale de la nullité, celle de l’impertinence ou du manque de tenue dans ces salves de questions et d’attaques plus ou moins subtiles.
Cependant, c’est surtout l’aspect théâtral qui ressort de toute cette pitoyable opération.
Ni d’un côté, ni de l’autre de la table ne semble émerger l’idée qu’il y a non seulement un problème de finance grave mais que ce sont bien les deux côtés, tous les deux en politique depuis plusieurs années, qui sont responsables de l’effondrement financier de la République auquel on assiste actuellement et que c’est l’intégralité de l’appareil politique français, absolument incapable de tenir le moindre budget depuis 50 ans, qui a mené le pays dans le talus.
Au lieu de travailler à répondre aux questions essentielles à la marche du pays, à savoir essayer de comprendre pourquoi les recettes fiscales se sont effondrées, pourquoi les taxes ne rentrent pas assez, pourquoi les dépenses filent sans frein, les deux politicards se sautent à la gorge l’un de l’autre.
L’arrogance insupportable du gamin d’un côté contre les manœuvres politiciennes du sexagénaire de l’autre ne parviennent pas à faire oublier que ces personnages, et avec eux, toute la clique qui parasite le pays depuis plusieurs décennies, ont choisi de creuser les dépenses, de faire exploser la dette et de tabasser le pays de taxes et d’impôts comme jamais dans son Histoire et comme aucun autre pays dans le monde.
Car c’est bien Attal, ses prédécesseurs et son actuel successeur, ce sont bien Husson et ses collègues du Sénat, c’est clairement les députés actuels comme ceux des quinze ou seize législatures précédentes qui ont enfoncé le pays dans sa situation actuelle. Ce sont ces pignoufs qui entendent, sans le moindre doute, taxer un peu plus le pays le plus taxé du monde : ils espèrent ainsi redistribuer un peu plus dans le pays le plus redistributeur du monde et, pompon de l’affaire, entendent sans vergogne ajouter de la dette à un des pays les plus endettés du monde au prétexte que – tenez-vous bien – ce pays a aussi l’administration fiscale la plus efficace du monde pour aller chercher le pognon gratuit des autres là où il est !
Au bilan, l’État français n’a jamais autant écrabouillé son peuple sous le fardeau de son obèse impotence ; tout le monde s’en rend compte, tout le monde le sait, mais ces branle-musards entendent à la fois relancer le bastringue pour une année supplémentaire, et surtout se dédouaner complètement de toute responsabilité dans le constat d’échec des politiques menées jusqu’à présent.
En fait, alors que l’odeur de faillite est si forte qu’on la sent jusque dans cette vidéo et qu’on la voit grossir derrière les yeux pochés d’Attal, les chamailleries qu’elle nous offre illustrent la faillite complète de nos institutions, très manifestement aussi incapables de désigner les responsables – alors qu’ils sont pourtant évidents pour le peuple – qu’incapables de corriger les erreurs commises. En fait, le dialogue de sourd entre les deux politiciens démontre même à l’envi qu’ils sont persuadés (ou font semblant de l’être, ce qui est probablement pire) qu’aucune erreur n’a réellement été commise, ce qui tendrait à montrer que les institutions sont, ontologiquement, destinées à foutre tout le pays au talus dans la décontraction et l’absence totale de toute remise en question des dirigeants.
Tout ce que cette vidéo montre, c’est que ce ne sont pas des hommes qui cherchent à redresser une situation catastrophique, mais des domestiques qui se battent pour partir avec l’argenterie. Ce que ces pathétiques débats et ces chamailleries d’égo démontrent, c’est que la France n’est perçue que comme une grosse tirelire par les individus qui se sont hissés à sa tête, généralement par tromperie et par manigances.
Tout le jeu de l’immense bureaucratie mise en place, des administrations tentaculaires, des taxes de plus en plus illisibles est de faire croire à cette majorité de Français qui ne paient pas d’impôts directs qu’ils sont encore gagnants de ce système qui leur est pourtant largement défavorable à tous points de vue. Et quand aux autres Français qui, eux, ont compris la situation, ceux-là n’ont pas leur mot à dire, ni dans les médias, ni dans l’hémicycle. Ils ont été soigneusement tenus à l’écart.
Ils payent, pour tout, tout le temps, mais ne sont pas représentés. Or, mécaniquement et alors que les dépenses de l’État obèse persistent à grossir, leurs rangs grandissent chaque jour. Cela ne peut pas bien se terminer.
Le Titanic a heurté l’iceberg depuis un moment, les cales se remplissent d’eau. Cette vidéo ne montre pas l’équipage, tentant le tout pour le tout pour sauver le maximum de passagers, mais montre les couards de service qui se battent pour les canots de sauvetage en poussant tout le monde sur leur passage.
Ce pays est foutu.