Les élections sénatoriales viennent de se tenir en France, dans une indifférence quasi-totale de la population – bien légitime. Il est vrai que ne se déroulant pas au suffrage universel direct, elles provoquent moins d’intérêts, d’autant plus que généralement, rien ne change profondément. Et cette fois-ci ne fait pas exception. Sans souveraineté, le processus électoral n’est que légitimation d’une illusion.
Une fois tous les trois ans, le Sénat est renouvelé par moitié sur vote des grands électeurs, qui sont en général des élus locaux. Hier, 24 septembre 170 sièges des 380 ont été renouvelés, dans une ambiance très feutrée.
Globalement, rien n’a changé – et tout est fait pour. La majorité dite de droite (LR) et centriste (UC) reste majoritaire avec sensiblement le même nombre de sièges. L’on note une légère augmentation à gauche, chez les écolos, la stabilité chez les communistes, et un léger recul chez Renaissance, le tout saupoudré d’une timide entrée du RN avec … trois sièges.
La politique française, intérieure ou internationale, en sera-t-elle changée ? Bien sûr que non. Cela fait longtemps que les élections ne déterminent plus en France la ligne politique, celle-ci est déterminée en dehors de nos frontières. En revanche, les élections ont pour but principal de renouveler les visages afin d’éviter la lassitude populaire et d’entretenir l’illusion démocratique, sans laquelle le système globaliste s’effondrerait. Et tout le monde est content, autant les partis du pouvoir que ceux d’opposition, chacun a sa place dans cette pièce bien orchestrée et, nous pouvons féliciter les acteurs, ils jouent parfaitement leur rôle sans s’éloigner du scénario.
Comme nous avons pu le voir avec les grands événements politiques, ni les organes institués (comme le Sénat), ni les élus des partis d’opposition n’ont joué le rôle de contre-pouvoir. Leur défaite et leur fuite en rase campagne fut tout aussi visible lors de la gouvernance globalisée covidienne, qu’aujourd’hui lors de la guerre en Ukraine. Ils sont tous aussi soumis au diktat de la domination européenne, même s’ils parlent de lutte contre l’immigration ou de relance économique – illusoires, quand on ne maîtrise, ni les frontières, ni la monnaie nationale. Et ils le savent parfaitement.
L’on comprend dès lors le désintérêt des Français pour cette petite sauterie très privée.
Le scrutin sénatorial de la semaine prochaine n’intéresse que peu de Français (33%) (…). Si l’intérêt des Français pour les élections sénatoriales est faible, plus de trois sur cinq n’en estiment pas moins que le rôle du Sénat est important dans la vie politique de la nation (62%, une hausse de 19 points par rapport à 2015). En s’intéressant aux proximités partisanes, ceux qui reconnaissent le plus l’importance du Sénat dans la vie politique française se révèlent être les personnes proches des Républicains (80%), d’Europe Ecologie Les Verts (75%) et de Renaissance (73%) tandis que les partisans du Rassemblement National sont bien moins enclins à considérer le Sénat comme important dans la vie politique française (54%). Enfin, bien que le Sénat soit considéré par les Français comme étant utile à l’élaboration des lois (61%) ou à l’équilibre des pouvoirs (58%), seuls 34% considèrent qu’il est représentatif des territoires ruraux et 18% qu’il est moderne.
Comment reprocher aux Français de ne pas vouloir jouer le jeu des idiots heureux, auquel ils sont condamnés par cette parodie démocratique ? Le problème n’est pas dans le mode de scrutin ou dans le rôle du Sénat. Il est dans l’absence de vie politique nationale et dans la trahison des partis et des hommes politiques.
Karine Bechet-Golovko