par Pierre Van Grunderbeek.
Quand en 1916 Philip Snowden a écrit cette phrase « La première victime d’une guerre, c’est la vérité ». dans la préface d’un livre qui dénonçait les mensonges sur la Première Guerre mondiale, il ne pouvait deviner qu’elle deviendrait une citation célèbre.
Plus d’un siècle plus tard, la propagande de guerre a encore fait des progrès et elle est devenue une redoutable machine à bourrage de crâne, une expression inventée à la même époque par les poilus dans les tranchées pour dénoncer les mensonges de la presse parisienne.
Ce qui est particulier à la propagande de guerre actuelle, c’est qu’elle s’en prend à un pays qui ne nous a même pas agressé. Bien au contraire, ce pays nous a toujours vendu des hydrocarbures à des prix avantageux et il nous a acheté en compensation des produits de luxe et des produits à haute valeur ajoutée.
Les dernières sanctions étaient censées être fatale à l’économie russe mais elles reviennent à l’envoyeur comme un boomerang. Il n’y a pas de retour en arrière possible, la confiance est rompue et je crois qu’il va falloir apprendre à vivre avec un coût prohibitif de l’énergie, d’abord pour les entreprises et ensuite et surtout pour les plus démunis d’entre nous.
Il faudra aussi voir si après le gel des réserves russes et la mise sous séquestre des biens des oligarques, le dollar et l’euro conserveront la confiance des détenteurs de capitaux.
En imposant des sanctions dont les effets se retournent contre eux-mêmes, les démocraties représentatives atteignent la limite avant la déconnexion totale avec leurs électeurs, victimes indirectes des sanctions.
Les promesses électorales sont déjà de moins en moins tenues ou ne peuvent être tenues à cause de décisions prises à des niveaux extranationaux. De plus en plus de pouvoir est délégué à des organismes non élus qui n’ont pas de comptes à rendre et dont on ne voit pas très bien [ou alors trop bien] quels intérêts elles défendent.
Petit à petit, l’idéologie et les intérêts de l’oligarchie ont pris le pas sur une organisation harmonieuse de la société.
De leur côté, les médias dominants continuent leur communication belliqueuse à sens unique.
Certains, peut-être même la majorité des citoyens européens, se soumettent docilement à cette rhétorique de guerre or personne ne leur explique les détails et les conséquences pour notre niveau de vie. Ceux qui essaient quand-même sont ostracisés et complotisés.
Dans notre système orwellien, le Ministère de la Vérité est le seul à pouvoir dire le vrai.
L’Union européenne s’est placée elle-même dans un triple piège dont je ne vois pas comment elle pourra s’extirper.
1. Le piège de transition vers la croissance verte et de zéro émission de carbone. Une vue de l’esprit absolument irréalisable. La France est responsable d’environ 1% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. À quoi cela sert de chercher à les réduire si les plus grands pollueurs de la planète les augmentent ? Les producteurs de pétrole et de gaz ont de leur côté cessé de prospecter vu le manque de perspectives d’avenir à cause de l’abandon programmé des hydrocarbures. Il n’y a donc pas de volume supplémentaire sur le marché de l’énergie pour le moment d’où le coût élevé des hydrocarbures.
2. Le piège de la reprise après deux ans de crise sanitaire. L’Union européenne n’a pas anticipé l’augmentation de la demande d’hydrocarbures dans le monde. Les États-Unis sont auto-suffisants, l’Asie a conclu des contrats à long terme avec les pays producteurs et est assurée d’être livrée mais l’Union européenne a misé sur un marché spot [ou marché à court terme] où le gaz liquéfié devenu rare et cher est livré le lendemain de son achat.
3. Le piège des sanctions contre la Russie. Bruno Le Maire a beau s’être rétracté, c’est bien une guerre économique destinée à ruiner la Russie qui a été déclarée contre notre principal fournisseur d’hydrocarbures. L’espoir de voir une Russie ruinée céder ses matières premières à vil prix ou pour des devises inutilisables [gelées] à l’Europe est absurde. Espérer un renversement du président Poutine l’est encore plus : 83% des Russes soutiennent leur président et 81% soutiennent la guerre. (The New York Times citant le Centre Levada)1. Les Occidentaux sont honnis à 90% pour avoir volé 50% des avoirs russes (environ 300 milliards de dollars). Les surplus en devises de la Russie ne seront plus convertis en obligations d’État. La BCE devra sans doute compenser la perte des futurs achats d’obligations par de la création monétaire d’où plus d’inflation assuré. Il s’agira de montants gigantesques de l’ordre de 200 milliards de dollars par an.
Ces trois pièges qui s’additionnent risquent d’être fatals à l’euro et aux économies européennes et je n’évoque même pas une rupture des approvisionnements russes en gaz.
Les États-Unis cherchaient à provoquer une guerre fratricide entre le Russie et l’Ukraine depuis huit ans et ils y sont arrivés.
Ils voient une possibilité de sortir de la crise du capitalisme libéral en vassalisant de nouveaux pays et en remettant le compteur des dettes souveraines à zéro comme prescrit dans le Grand Reset.
Une guerre entre la Russie et l’Ukraine [et l’OTAN] serait le prélude à une guerre entre les États-Unis et la Chine, seule puissance capable de détrôner à terme les États-Unis de sa place de première puissance mondiale.
Une incroyable campagne médiatique truffée de mensonges et de diffamation est actuellement lancée contre la Russie. En cas plus que probable de défaite militaire ukrainienne et de concessions territoriales, il sera aisé d’accuser la Russie d’être responsable de l’effondrement économique qui s’ensuivra. Les sacrifices seront alors demandés aux citoyens européens au nom d’une économie de guerre tout-à-fait artificielle qui aurait pu être facilement évitée si nos élites étaient plus clairvoyantes et moins arrogantes.
Le premier pays victime de cette propagande de guerre est l’Ukraine elle-même.
Sa population n’a pas compris qu’elle était le jouet d’une narrative antirusse entretenue par les faucons occidentaux et elle va payer sa crédulité d’un prix élevé.
L’Ukraine était déjà avec la Moldavie le pays le plus pauvre d’Europe. En perdant son principal client, à savoir la Russie, son industrie lourde s’est effondrée de moitié en 10 ans2.
Elle a signé un partenariat avec l’Union européenne et son parlement l’a entériné sans même avoir connaissance du texte. Cela peut sembler invraisemblable à tout-un-chacun mais c’est la réalité. Les Ukrainiens croyaient avoir signé leur entrée en Union Européenne en 2014.
Ils croyaient aussi avoir la protection de l’OTAN avec la venue en nombre d’instructeurs et la fourniture d’armes occidentales sophistiquées.
Les oligarques d’ici et d’ailleurs ont appris la manière de manipuler les peuples. Des articles de presse faux et mensongers, une propagande outrancière et le règne de l’émotionnel sont devenus les armes de désinformation des médias traditionnels.
Des agents d’influence aux titres aussi ronflants que leur suffisance est grande nous inondent sur les plateaux TV de leurs certitudes qui ne sont en définitive que leurs espoirs déçus.
Je les écoute et je me demande souvent comment on peut être assez bête pour les croire.
Primum veritas, deinde caritas, d’abord la vérité, ensuite la charité [ou l’amour] disait déjà saint Augustin au IVe siècle.
La vérité est avant tout l’absence de mensonge. Avec des mensonges par omission, on obtient des demi-vérités.
La propagande de guerre mélange à la fois des mensonges et des mensonges par omission avec des vérités sélectionnées. C’est d’une efficacité redoutable dans des démocraties où par définition, la liberté d’expression doit confondre le mensonge.
Le génie de la propagande de guerre actuelle, c’est d’avoir muselé la contradiction.
Si l’Union européenne veut retrouver la prospérité qui quoiqu’on en dise est liée à un coût de l’énergie bon marché, elle devra avant tout reconnaître la vérité.
De son côté, la Russie fait preuve d’un flegme imperturbable. Elle est fermement déterminée a obtenir les garanties de sécurité qu’elle réclame quel qu’en soit le prix à payer.
L’Ukraine et ses alliés dont la France des deux derniers présidents français n’ont pas été à la hauteur de leurs responsabilités. Ils n’ont pas compris que la Russie contemporaine n’est pas une république bananière qui doit se taire, vendre ses richesses naturelles et voir passivement une anti-Russie se constituer à ses frontières.
La stratégie russe est passée par trois stades
• Premier stade et les accords de Minsk 1 et 2 de 2014. C’était la dernière chance pour l’Ukraine de conserver l’intégralité de son territoire3. Ils devaient être appliqués en décembre 2015 au plus tard mais l’Ukraine a fait traîner les négociations en longueur. Cela lui a permis de se réarmer et de s’illusionner capable de prendre les provinces rebelles par la force. Angela Merkel et les présidents français, garants des accords de Minsk, sont responsables d’avoir laissé les autorités ukrainiennes bafouer les termes des accords et d’avoir rejeté la responsabilité de sa non application sur la Russie. Ce n’est que maintenant mais trop tard qu’on entend que finalement, l’Ukraine ne respectait pas sa signature.
• Deuxième stade et les demandes de garantie de sécurité du 17 décembre 2021. La Russie a proposé aux États-Unis un traité qui devait limiter la zone de l’OTAN en Europe et donner un statut neutre à l’Ukraine. Elle a reçu une fin de non-recevoir de l’administration Biden.Ici encore, Emmanuel Macron et Olaf Scholz n’ont pas été à la hauteur de la situation. Comment peut-on laisser les États-Unis décider seul de la sécurité en Europe alors qu’on sait qu’ils ont un agenda caché pour l’Ukraine ? Il fallait prendre l’initiative dès le début, se concerter et se rendre à Washington (et pas à Moscou) pour dire que la sécurité de l’Europe est d’abord le problème de l’Europe et le faire savoir à Moscou.
• Troisième stade et l’intervention russe du 24 février 2022. Les experts militaires russes savent interpréter les images satellites aussi bien que les experts américains. Il n’y avait aucun doute pour eux qu’une offensive contre les provinces séparatistes était imminente. La Russie a pris les devants et a lancé elle-même une offensive surprise. Les exigences russes sont devenues plus importantes : elles sont maintenant au minimum les suivantes. – Un statut neutre et non nucléaire de l’Ukraine. – L’Ukraine n’adhérera pas à l’OTAN. – La démilitarisation de l’Ukraine. – La dénazification du pays. La Russie entend par dénazification non seulement la dissolution des organisations néo-nazies mais aussi l’arrêt de la propagande antirusse, du révisionnisme historique, de l’interdiction des partis pro-russes, de l’interdiction de l’usage de la langue russe et des autres mesures de ce type qui ont été votées depuis 2014.
• La reconnaissance du rattachement de la Crimée à la Russie et de l’indépendance des provinces de Donetsk et de Lougansk.
Suivant l’évolution de la situation militaire sur le terrain, d’autres exigences pourraient être mise sur la table comme une partition de l’Ukraine avec l’Est et le Sud détachés de Kiev par exemple.
Il faut préciser ici que l’opinion publique russe est remontée à bloc contre l’Ukraine. Les exactions et les meurtres contre les soldats russes prisonniers sont vues sur les chaînes TV russes et sur les réseaux sociaux. On voit aussi les témoignages de civils ukrainiens qui ont servi de boucliers humains aux milices ukrainiennes. Leur diffusion est interdite en France parce que trop violente. Il ne faut pas espérer un revirement de l’opinion publique russe, bien au contraire, ce sont les négociations de paix d’Istanbul qui sont critiquées sur les réseaux sociaux.
Les Occidentaux ayant déjà sanctionnés la Russie au maximum possible, la Russie n’a plus à craindre des mesures qui pourraient la toucher davantage. Les Occidentaux n’ont plus de moyens de pression sur la Russie et c’est pour cela que la Russie ne tient plus compte des avis des pays inamicaux.
La diplomatie américaine essaie maintenant de faire pression sur les pays qui ne sanctionnent pas la Russie comme l’Inde par exemple pour qu’elle renonce aux contrats d’achat de pétrole contre des roubles et des roupies mais cela se présente mal pour les Occidentaux4.
Il faut d’ailleurs dénoncer une désinformation qu’on entend sur les médias en France.
La Russie serait isolée dans le monde car l’Assemblée générale de l’ONU a condamné la Russie pour son invasion de l’Ukraine ! C’est exact mais la plupart des pays qui ont voté cette condamnation n’applique pas de sanctions contre elle. C’est un coup d’épée dans l’eau pour les ennemis de la Russie.
Cela veut dire : ce que tu as fait n’est pas bien, mais on reste amis comme avant. C’est un grave échec pour les Occidentaux, du moins jusqu’à présent.
Voyez cette vidéo pour vous faire une idée du manque de soutien aux Occidentaux :
Il faut aussi ajouter le Mexique et l’Amérique centrale aux réticents à prendre des sanctions antirusses.
Je ne veux pas faire l’inventaire des sanctions occidentales contre-productives mais il y en a une qui est particulièrement savoureuse : la confiscation des biens des oligarques russes décidée en 24 heures.
- Cela fait 30 ans que ces oligarques transfèrent leurs bénéfices de Russie en Europe. Il s’agissait de centaines de milliards d’euros en tout et cela faisait vivre une industrie du luxe en Europe.
- Les plus prévoyants d’entre eux avaient déjà transféré une partie de leur fortune vers des paradis fiscaux et ne seront que peu touchés par les sanctions.
- Les yachts qui ont échappé à la mise sous séquestre sont en route pour la Turquie ou pour Dubaï.
- Dubaï s’est bien gardé de sanctionner la Russie ou de couper les liaisons aériennes. Dubaï risque de devenir la nouvelle résidence des oligarques russes.
- Enfin et cerise sur le gâteau, les oligarques en question sont détestés en Russie. Rien ne fait plus plaisir aux Russes que de voir ces oligarques sanctionnés.
Les oligarques expatriés n’avaient plus aucune influence au Kremlin. Les punir, c’est se priver de milliards d’euros de transfert depuis la Russie. Les oligarques proches du Kremlin ont compris depuis longtemps qu’ils ne doivent pas placer leurs avoirs en Occident. Les sanctions ne peuvent les atteindre.
Pour finir, un dernier point qui est rarement soulevé.
L’Occident paie plus de 700 millions d’euros par jour à la Russie pour l’achat d’énergie et de matières premières. Cela fait 21 milliards d’euros par mois ou 250 milliards par an5.
D’un autre côté, elle interdit la vente de toute une série de produits sans valeur militaire mais cela n’aura aucun effet sur la Russie, elle est préparée à vivre en autarcie.
En revanche, les projets en partenariat avec les Européens sont suspendus. Le projet d’une ligne de TGV entre Moscou et Saint-Pétersbourg (700 km) en partenariat avec Siemens par exemple tombe à l’eau et il sera sans doute repris plus tard par une entreprise chinoise.
Les devises occidentales reçues pour les hydrocarbures seront converties en roubles ce qui augmentera la demande et renforcera mécaniquement la devise russe. Dans un deuxième temps, la Russie pourrait très bien adosser sa monnaie à l’or et à ses énormes quantités de matières premières et renoncer totalement aux dollars et aux euros.
C’est l’avis que donne l’économiste Sergueï Glasiev, un conseiller qui avait été écarté par Vladimir Poutine il y a quelques années et qui semble revenir en grâce au détriment de l’équipe libérale pro-occidentale qui domine actuellement l’économie russe6.
En résumé, les Russes vont acheter des voitures chinoises et indiennes, certes pas aux normes européennes mais qui roulent quand-même, avec l’argent qu’elle reçoit de l’Occident.
Les petits génies européens qui se prennent pour des pères Fouettard n’y avaient pas pensé.
Un autre point étonnant. Le président ukrainien, l’habitué aux « standing ovations » dans les parlements, fustige les Occidentaux pour leur addiction au gaz russe. Il demande l’arrêt immédiat de tout achat de gaz mais je me demande pourquoi il ne commence pas par couper les vannes en Ukraine. Le gaz continue à traverser l’Ukraine comme si de rien n’était !!!
On a eu Greta Thunberg et maintenant on a Volodymyr Zelensky pour nous dire comment on doit agir.
Le passage au rouble ou au Yuan pour les achats de gaz est une bombinette de quelques kilotonnes. Si la Russie et la Chine, tous deux grands exportateurs l’un de matières premières et l’autre de produits manufacturés exigeaient d’être dorénavant payés dans leur monnaie nationale pour l’ensemble de leurs exportations, ce serait une bombe nucléaire de plusieurs mégatonnes et une troisième guerre mondiale assurée.
Les États-Unis ne peuvent pas se permettre l’éviction du dollar comme première devise du commerce mondial sous peine de voir toute leur économie s’effondrer.
Vladimir Poutine et Xi Jinping en sont conscients et ils jouent les équilibristes pour ne pas prendre la décision qui ferait basculer les États-Unis dans la crise.
Il faudrait que les va-t’en guerre qui se réjouissent des sanctions contre la Russie se rendent compte que les présidents russe et chinois modèrent les contre-sanctions pour préserver la paix mondiale pour autant que c’est encore possible.
Je comprends qu’on ait de l’empathie pour le peuple ukrainien.
Je ne comprends pas pourquoi on n’en a jamais eu pour les habitants du Donbass qui se faisaient et qui se font encore bombarder par l’armée ukrainienne. Là aussi, il y a des milliers de morts.
Les doubles standards ne dérangent pas le moins du monde nos élites dirigeantes qui sont toujours promptes à parler de valeurs mais qui n’ont pas de principes.
Pour conclure cet article, je constate que les médias occidentaux jubilent encore une fois trop vite en croyant à une défaite russe sur le terrain alors que la Russie n’a engagé qu’un dixième de ses forces.
Suivant les derniers développements sur le terrain, les forces russes se regroupent dans le sud pour en finir avec les 70 à 80 mille soldats ukrainiens concentré dans le Donbass. Ce sont les unités d’élite équipées aux normes de l’OTAN qui sont retranchées dans de petites villes du Donbass. Vu les interminables colonnes d’artillerie qui se dirigent de tous les côtés vers le Donbass, on peut prédire que la Russie va revenir à sa tactique habituelle : un déluge de feu sur les positions ennemies pour l’ensevelir sous les décombres.
Le retrait des troupes russes du nord de l’Ukraine indique selon moi que la Russie va créer un nouveau pays dans l’est et le sud de l’Ukraine. Pour ceux qui connaissent l’histoire de la région, cela correspondrait à la Novorussie.
D’un point de vue géopolitique, cela a un sens mais il ne faudrait pas que l’Ukraine résiduelle devienne un avant-poste de l’OTAN, un couteau dans le ventre de la Russie, sinon la Russie n’aura rien gagné.
source : Mondialisation
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