Rappelez-vous, c’était il y a quelques années : en tant que citoyen français, vous pouviez quasiment faire ce que vous vouliez de vos finances après les indispensables ponctions fiscales et sociales qui permettaient au pays de disposer d’un système social que le monde entier nous enviait (sans nous copier, pas fou). Mais ça, c’était il y a quelques années…
En effet, grâce aux gouvernements Macron, fini les affres de la responsabilité citoyenne : rapidement, la liberté financière fut contenue, régulée, découpée en petits morceaux faciles à digérer dans les bedaines parlementaires et bientôt, le citoyen français n’eut plus besoin de se soucier de ce qu’il devait faire de son argent.
Il était temps : le peuple français, las d’avoir à réfléchir et prendre ses responsabilités, travaillé au corps depuis des décennies dès sa plus tendre enfance par les doux discours marxisants et léninifiants, délégua enfin toutes les tâches importantes à ses éminents gouvernants qui se chargèrent alors de tout prendre en charge (moyennant une petite commission et 3.000 milliards de dettes, hein, sachons vivre).
À partir de là, les décisions empreintes d’une imparable logique, de pertinence subtile et d’une analyse inouïe du sens de l’Histoire se sont enchaînées avec brio dans le pays.
C’est ainsi qu’il fut décidé, assez calmement, que c’en serait définitivement terminé de la production électrique nucléaire française. C’était dit, écrit, répété : fini l’atome cradingue qui ne rejette pas de CO2, place aux éoliennes dégueulasses et au gaz russe sordide qui pollue pour le remplacer. Quelques réacteurs furent donc fermés. Les gouvernants s’en félicitèrent bruyamment, la presse aussi. Une loi fut votée pour que d’autres réacteurs soient, à leur tour, abandonnés dans les prochaines années.
Tout était bel et bon.
Puis, toujours avec sa logique imparable, sa pertinence subtile, son sens inné de l’Histoire, l’élite décida qu’il était temps de faire un petit demi-tour bien ferme.
Et alors que la loi de Programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit toujours la fermeture de 12 réacteurs supplémentaires d’ici 2035, le frétillant chef de l’État pirouettise sa politique et propose à présent – toujours sans toucher à cette loi – de flécher l’épargne des Français pour financer le développement de nouveaux réacteurs nucléaires. Si ce “En-Même-Temps” ne touchait pas ainsi au sublime, on croirait presque que c’est du n’importe quoi en boîte.
Concrètement, il semble donc décidé en hauts lieux que le Français, très moyennement capable de gérer ses finances, va voir son épargne délicatement poussée (à coup de pelle dans la nuque par des incitations fiscales ciblées, par exemple) vers une nouvelle vague de financement de l’énergie nucléaire en France, celle-là même dont on entend réduire l’importance, qui n’est pas verte et qui tue des ours polaires quand on n’en regarde pas la démographie.
On apprend ainsi que les 375 milliards d’euros (à fin 2022) d’épargne des 55 millions de Français qui possèdent un Livret A pourraient ainsi servir à financer de nouveaux réacteurs pour EDF (avec un coût total un peu inférieur à 60 milliards d’euros).
Or, si l’on peut bien sûr se réjouir de voir le gouvernement prendre la mesure de l’importance d’une stratégie énergétique de long terme, on doit cependant s’inquiéter des nouvelles tubulures fiscales chromées qu’il va déployer pour la mettre en place, et ce d’autant plus lorsqu’on voit les cadors qui proposent cette stratégie, leur historique général et leur capacité à tenir leurs engagements précédents, et ce, sans même parler du fait que les fonds étaient jusqu’à présent consacrés au logement social : on imagine sans mal la poussée d’urticaire de certaines égéries écolo-socialo-branchouilles lorsqu’elles apprendront la mise en place de ce tour de passe-passe : moins de social, plus de nucléaire, ça va roucouler chez les gauchistes…
En outre, peut-on écarter l’idée que ce qui est encore actuellement présenté comme des idées et des incitations ne va pas devenir rapidement des obligations et des contraintes clairement établies dans un avenir proche, à mesure que la situation du pays va devenir plus tendue ?
Du reste, il serait probablement plus aisé pour l’État de dégager les marges de manœuvre financières pour s’investir dans ces plans stratégiques si, d’un autre côté, il ne s’employait pas méticuleusement à saboter toute création de richesse. L’avalanche de décisions consternantes des 40 dernières années (l’arrêt du nucléaire n’étant que la décision la plus symptomatique du niveau d’abrutissement et de veulerie atteint au sommet du pouvoir) ainsi que le tabassage systématique et de plus en plus compulsif des créateurs d’emploi et de richesses dans le pays n’ont aidé en rien.
Clairement, cette espèce de volte-face des dirigeants au pied du mur manque cruellement de l’indispensable remise en question des méthodes et pratiques mafieuses de l’État jacobin et indique plutôt une forme de panique non avouée qui ne présage d’absolument rien de bon. Alors certes, il est souhaitable de relancer l’investissement dans le nucléaire, mais la façon et le timing diabolique avec lesquels le gouvernement actuel procède imposent une extrême prudence…
La semaine qui vient de s’écouler n’est pas très différente des précédentes et illustre finalement très bien la tendance générale du pouvoir actuel à resserrer son emprise sur tout ce qui concerne le citoyen français, notamment ses finances qu’il conviendra de pousser dans les bonnes directions : dans l’œil de l’État macronien, ce citoyen n’est définitivement pas assez intelligent pour comprendre sa situation, et n’est pas plus capable de savoir les investissements qu’il doit faire pour s’assurer un avenir meilleur.
L’élite qui est au pouvoir (parce que c’est l’élite, voyons, et parce qu’elle mérite ce pouvoir, pardi !) sait ce qui est bon pour ce citoyen, mammifère mou et vraiment pas fin, perdu dans une vie que cette élite sait médiocre et ballotée par des événements qu’elle seule est capable d’anticiper voire de provoquer.
Il est dès lors normal qu’elle censure, qu’elle impose, qu’elle “flèche” et qu’elle décide pour vous. Et au vu de son historique, de son passif aussi puissant qu’édifiant, comment en douter ?