Aujourd’hui, lisez un extrait du livre de François Rouillay et Sabine Becker pour découvrir leur vision holistique de l’autonomie alimentaire. Selon eux, il est temps le que le citoyen participe à la création de sa nourriture et que chacun prenne conscience de la nécessité de protéger les ressources naturelles qui nous permettent d’être en vie.
◆ La gestion des biens communs : une responsabilité délicate
Sur un territoire donné, à qui revient la responsabilité de l’établissement de l’autonomie alimentaire ? La question n’est pas couramment débattue.
Et pourtant ! En revanche, on y parle beaucoup politique agricole commune, programme alimentaire territorial, subventions, incitations, contrôles sanitaires, quotas, assurances, syndicats professionnels, règlementations, normes, directives, respect des traités commerciaux, libre-échange, exportations, importations, cours des matières premières…
Mais qui est garant du respect des animaux, de végétaux, des sols, de la qualité de l’eau, de l’air ? Ne sont-ils pas des biens communs ?
Où doit se situer la responsabilité politique, celle qui a pour mission de veiller au respect du vivant, des producteurs et des consommateurs, et de préserver l’homme de cette absurde réalité qu’est la pauvreté ?
Aujourd’hui, les dirigeants des nations et leurs protocoles politiques sont impuissants à qualifier d’intérêt public ce qui doit l’être pour le bien de l’humanité. Et les forces vives s’épuisent.
Mais à l’encontre de cette désespérance, n’y a-t-il pas de place pour une participation citoyenne souveraine, créative, autonome, consciente du bien commun, désireuse de se prendre en main, à son niveau, et de contribuer à son autonomie alimentaire ?
Notre société de consommation a tendance à occulter ce qui ne va pas dans le sens du « système », mais il existe pourtant dans le monde bien plus de microfermes familiales produisant de la nourriture que de grandes structures de monocultures industrielles.
◆ De quelle autonomie alimentaire parlons-nous ?
De la capacité d’un territoire urbain à produire une nourriture saine permettant de répondre aux besoins quotidiens primordiaux de ses habitants.
Pour nous, autonomie alimentaire veut dire : autonomie et alimentaire.
– Le mot « autonomie » se décline avec : souveraineté, liberté, mais également avec coopérations, collaborations, cocréation, entraide, partage.
– Celui d’« alimentaire » avec : nourriture, santé, vertus, équilibre, respect du vivant.
Il s’agit d’une nourriture constituée de fruits, de légumineuses, de noix, de diverses céréales, d’oeufs et de viandes, si nous sommes loin de la mer, de poissons d’élevage en eau douce, ainsi que de produits laitiers et d’huiles végétales; le tout étant récolté, voire transformé sur ce territoire ou situé dans une proche périphérie (moins d’une heure environ de trajet), élevé et cultivé selon des méthodes respectueuses de la santé et de l’environnement.
Une nourriture saine est constituée de produits de saison, non génétiquement modifiés, aux semences reproductibles et n’ayant pas subi de traitement chimique.
Elle est produite par des paysans à titre individuel, coopératif ou collectif, mais également par les citoyens eux-mêmes, disposant d’un lopin de terre ou d’un jardin, ou bien engagés dans des démarches collectives urbaines ou périurbaines. Cette autonomie alimentaire requiert donc une certaine disponibilité foncière. Elle nous conduit à voir dans la terre une opportunité. Il s’agit bien d’un changement de regard.
La terre est considérée comme le lieu de production agricole et non plus comme un lieu de divertissements ou de spéculation. Nous la considérons alors comme notre bien le plus précieux avec l’eau que nous buvons et l’air que nous respirons, un bien que chacun de nous doit veiller à préserver. Il s’ait d’une attitude intérieure à adopter individuellement.
En l’état actuel des choses, il est possible de cultiver de la nourriture sans intrants chimiques, sur peu d’espace, sans retourner la terre, selon les principes d’une agriculture écologique, sans que cela coûte à l’homme beaucoup d’efforts, par le recours à des méthodes régénératives des sols.
Il s’agira donc de réfléchir, ou plutôt de vous inviter à réfléchir, au système que vous voulez privilégier, à votre implication et à votre positionnement en tant que producteur et/ou consommateur, en ayant conscience de l’impact que cela produira dans votre environnement immédiat, pour vous et vos proches, mais aussi pour la collectivité dans laquelle vous vivez.
◆ Apprendre à vivre selon ses besoins : l’heure des choix
On entend souvent que la nourriture naturelle de proximité est inabordable sur le plan budgétaire. Certes, les prix sont plus élevés, mais regardons notre budget dans son ensemble et ayons l’honnêteté de voir vers quels postes vont les dépenses : généralement de moins en moins pour la nourriture et de plus en plus pour l’informatique, les produits de haute technologie ou même des loisirs de masse, autrefois de luxe, mais aujourd’hui démocratisés et populaires, tels que des croisières sur des monstres des mers ou des séjours exotiques à bas prix.
Nous parlons ici de budgets supérieurs aux minimas sociaux en cours et au seuil de pauvreté. Mais les personnes aux budgets inférieurs, dépendantes de la banque alimentaire et des solidarités, pourraient bien entendu rejoindre les jardins partagés ou les fermes d’insertion.
Revenons à la famille disposant d’un budget moyen. Le remettre en question nous conduit inévitablement à redéfinir nos besoins et nos choix : habitat, voiture, boissons, habits, abonnements et loisirs divers… Lorsqu’en conscience, nous déciderons de donner la priorité à une alimentation saine, naturelle et vivante, alors d’autres postes de dépenses nous sembleront peut-être secondaires et seront revus à la baisse, ou même seront perçus comme inutiles, voire toxiques.
La voie de l’autonomie alimentaire va ainsi consister à mesurer ses besoins réels et à les distinguer de ceux insufflés par l’offre mondialisée et diffusée à grand renfort de publicité. Elle représente un véritable retournement, une révolution révolutionnaire.
François Rouillay et Sabine Becker
Extrait de leur livre « En route pour l’autonomie alimentaire » (Éditions Terre Vivante)
Découvrez toutes les connaissances en accès libre proposés par François et Sabine sur:
– Leur site internet : http://www.autonomiealimentaire.info
– Leur groupe Facebook
– Leur chaîne Youtube
– Leur chaîne Vimeo
François est conférencier, formateur et chercheur en agriculture urbaine et en conduite du changement par le dialogue avec la participation citoyenne. Il est connu pour avoir été l’initiateur en France, en réalisant devant chez lui le premier bac de nourriture à partager à Colroy La Roche en 2012, du mouvement « Les incroyables Comestibles » et accompagné son développement y compris dans de nombreux pays. Par ses travaux et son engagement il contribue au développement de l’autonomie alimentaire des villes, dont vous trouverez tous les outils pédagogiques sur ce blog.
Sabine est ingénieure – urbaniste ayant exercé dans la fonction publique d’État et des collectivités territoriales. Elle a pratiqué cette profession pendant plus de 30 ans, puis, en réponse à une quête incessante de reconnexion au Soi, est devenue thérapeute énergéticienne et formatrice. Elle est l’auteure du Précis de Permathérapie, « La Noble Tâche » que l’on peut consulter ici.
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